29. Dans les tripots de Piura

29. Dans les tripots de Piura

juillet 13th, 2014
05. Pérou

article précédent : 28. Stratégies de survie

Il est 18 heures, le soleil est déjà presque tombé, et enfin l’air brulant de Piura redevient respirable. Je suis dans la rue à attendre un certain Eduardo, un type dont je ne connais que la voix au téléphone. Quelques jours plus tôt, j’ai bu quelques piscos dans un bar avec l’ami d’une couchsurfeuse, et en racontant mon histoire j’ai eu le plaisir d’entendre que son frère était dealer dans une clandestina. Le mec était sympa, l’opportunité était bonne, j’ai pris le contact. Parkinson réparée, j’ai pu terminer mon étape désertique et arriver ici, dans la dernière grande ville du Nord du pays, à une cinquantaine de kilomètres de l’Equateur. Après avoir passé mes deux premiers jours avec Eva, ma couchsurfeuse, j’ai reçu l’invitation pour la partie de ce soir.

Au bout de la rue, un jeune à capuche a l’air désoccupé. Il fait des allers retours, me regarde de temps en temps, mais n’a pas l’air décidé à me parler. J’imagine que c’est mon homme :

–          Eduardo ?

–          Si ! Tu es Jonathan ?

–          Oui !

–         

–           On est loin ?

–          Non, c’est juste à côté tu vas voir.

Nous marchons côte à côte et arrivons rapidement sur une petite place tranquille et arborée. Dans l’un de ses coins, une porte peinte et un drapeau Inka Cola. Ca ressemble à l’entrée d’un café. Deux hommes discutent devant, Eduardo les rejoint et me fait entrer.

Je me trouve dans une toute petite salle, probablement cinq mètres sur trois. Des néons blanchâtres y éclairent les murs décrépis, le sol sale, un ventilateur et un réfrigérateur pour seul mobilier. A gauche, une table de poker déjà presque pleine occupe tout l’espace disponible. A travers une porte ouverte, je vois un salon dans lequel une femme assise sur un vieux canapé regarde la télévision. Le tripot a été installé chez l’organisateur. Pourquoi pas.

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Eduardo m’y installe péniblement une chaise entre deux péruviens suants, et j’ai à peine le temps de me demander ce que je fais ici que déjà je reçois mes premières cartes. On me demande combien je désire miser, et je suis surpris du montant de la partie : il s’agit de la plus petite table de mon voyage (environ 10 fois inférieure à ma limite habituelle), plus communément appelée  micro-limite. Vus la situation de Piura, ville complètement isolée dans le désert du Nord du Pérou, la jeunesse des joueurs présents et le dénuement des lieux, j’aurais du m’y attendre. En France, à ma connaissance ce genre de partie n’existe que sur internet. Ici, le prix de la main d’œuvre étant dérisoire, le rake (commission) de 5% à chaque main est suffisant pour permettre à ce genre de lieux d’exister et aux croupiers d’être payés.

L’endroit est folklorique. Un bon décor de film probablement. Comme d’habitude, mon arrivée a déclenché quelques regards étonnés. On s’enquiert de savoir qui je suis, je raconte le minimum. Pour être honnête, les quelques lycéens séchant les cours et autres trentenaires oisifs qui sont ici en ce jeudi après-midi ne me mettent pas particulièrement en confiance. En plus des mises vraiment faibles (même pour le Pérou) qui sont jouées ici et donnent un côté amateur à l’ensemble, l’atmosphère me semble un peu trop festive et alcoolisée. Je sens que c’est tout à fait le genre de parties où l’on n’hésite pas à marquer ou plier les cartes, jeter un œil par-dessus une épaule, donner un billet au croupier en échange d’un peu d’aide. Dans la profondeur du Pérou et la misère d’un tripot qui n’a même pas de quoi se payer un local, je suis probablement le premier étranger qui s’installe ici, et n’ai pas spécialement envie d’y être leur pigeon.

Ma mauvaise impression se confirme rapidement. La toute première main me met dans l’ambiance : après plusieurs limpers, un trentenaire balance son tapis de vingt blindes, et se fait payer dans l’instant par un jeune à casquette. Le premier montre AJs, le second, goguenard, table 93o. Un 3 au flop déclenche l’hilarité générale, y compris celle du trentenaire. Ce n’est pas du tout le poker que j’aime. Cette compétition saine, l’amour du beau jeu, la compréhension et la stratégie face à des adversaires tous différents. La plupart jouent extrêmement mal, connaissent à peine les bases. Ils ont cavé le minimum, c’est-à-dire presque rien, et à ce niveau là, la part de technique devient négligeable.

C’est le degré zéro du poker, une vraie loterie. Ici on joue parce qu’on aime la surprise et l’argent, parce qu’on adore voir quelle sera la prochaine carte et comment elle va retourner la situation. On joue parce que c’est le seul endroit où l’on peut tranquillement boire aves ses potes après les cours ou le boulot, loin du regard des femmes. Parce que même si l’on perd la plupart du temps, la décharge d’adrénaline qui inonde le cerveau lorsqu’on finit par avoir un peu de chance nous fait oublier tout le reste. Parce qu’il n’y a rien de plus excitant que de démonter un bon joueur avec une poubelle (main faible). Le punir d’être meilleur que soi en essayant de le mettre à terre, en l’humiliant à travers les cartes. Il y a quelque chose de vraiment malsain là-dessous.

Je reste deux heures, sans qu’il ne se passe grand-chose. Dans ce genre de partie au niveau extrêmement faible, bluffer est inutile. La seule stratégie rentable est d’attendre de recevoir du jeu et de le valoriser. Mais comme avec Parkinson quelques jours plus tôt, je suis tombé en panne en plein désert. Ennui… Vers 20 heures, ma couchsurfeuse qui vient me chercher pour aller dîner m’offre un prétexte parfait pour m’enfuir. J’ai gagné quelques soles, de quoi m’offrir le dîner. Alors que nous nous dirigeons vers le restaurant, je parle avec Dana, sa meilleure amie, qui nous héberge ce soir.

« Tu te rappelles que je t’avais parlé de mon ami qui jouait souvent ici ? Je l’ai appelé, il y a une partie ce soir ! Je lui ai parlé de toi, et il m’a dit qu’il n’y avait pas de problème pour que tu viennes. Tu veux que je te fasse inviter ? »

Deux clandestines dans la même soirée… J’ai été un peu frustré du déroulement de la première, et ne suis pas mécontent de pouvoir enchainer. Elle appelle Tiago, le contact en question, qui nous rejoint tout de suite pour aller manger. Fin de la vingtaine, typé étudiant, sympa. Il est passionné de poker, me raconte qu’il gagne sa vie grâce aux cartes, ce qui est rare en Amérique du Sud. Il s’est qualifié récemment pour le LAPT Sao Paulo (un tournoi international à 1500$), et pense lâcher ses études pour devenir pro. Nous mangeons notre soupe de poulet en discutant tous ensemble, Tiago semble hypnotisé par Dana, et je me rends compte que s’il a été si réactif pour m’aider, c’est probablement un peu intéressé. D’une certaine manière ce n’est pas plus mal. Depuis mes dernières mésaventures en Bolivie, j’ai décidé de ne plus entrer dans des parties sans y avoir un contact direct, et celui-ci en l’occurrence a l’air de vouloir faire bonne impression, c’est la garantie que je n’aurai pas de problèmes.

Il fait désormais nuit à Piura, et nous nous rendons en mototaxi au local. Dans une rue déserte, quelques motos sont garées devant une double porte ouverte. Nous entrons dans une grande pièce peinte en vert, lumières tamisées, musique discrète, quelques jeunes qui ne s’occupent pas de notre présence, et des tables… De billard !

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Tiago m’emmène au fond. Quelques hommes passent le temps sur un jeu de cartes que je ne connais pas. Juste derrière, un comptoir derrière lequel est assis un trentenaire aux cheveux mi-longs et frisés. Il me repère, lance un regard interrogateur à Tiago qui me présente succinctement. A côté, un écran divisé en carrés diffuse en direct la capture de six caméras de surveillance. Trois transmettent l’activité de la rue, les motos, les trottoirs déserts, un taxi qui passe de temps à autre. Une me montre la grande salle, les tables de billards et les joueurs de cartes. La cinquième est un plan fixe de couleur vert, et sur la dernière je vois une salle vide, quelques chaises en plastique et une table de poker en son centre.

C’est du sérieux. Beaucoup plus que dans ma partie précédente. Nous restons quelques minutes à attendre que les joueurs de billard terminent leur partie. A leur départ, le gérant se lève, revient vers l’entrée et abaisse le rideau métallique. Désormais le club est fermé, et nous sommes complètement isolés de la rue.

 Puis il contourne les tables et ouvre l’une des portes. J’entre et reconnais la salle que j’avais vue dans les caméras de surveillance. Les joueurs de cartes se sont eux aussi levés et nous ont suivis.

Nous sommes neuf dans la pièce. Huit péruviens et moi.

En m’asseyant au centre de la table et en sentant les regards de tous ces inconnus pointés vers moi, je réalise que je suis étranger, seul, complètement isolé dans un club de billard fermé dans le Nord du Pérou.

Vulnérable.

Pourtant, même si une pointe d’anxiété vient me titiller, ce n’est pas ce sentiment qui domine chez moi à cet instant, mais un autre, bien plus positif et stimulant. Ce trouble que j’ai ressenti à chaque fois que la tension et les enjeux montaient. Celui qui arrivait quand deux as, enfin, promettaient de changer le cours de tout un voyage, quand l’asphalte se terminait brusquement et devenait une piste en terre, quand la musique se faisait plus lente et les corps transpirants : l’excitation. Cette excitation qui efface tout le reste, qui rend la peur si agréable. Celle qui fait sourire les marins juste avant la tempête.

Je réalise à ce moment précis, et avec une immense satisfaction que je suis exactement là où je veux être. Le genre d’endroit où je m’évadais quand, somnolant devant des maquettes dans la chaleur assommante du Sud de la France, je fantasmais mes futurs voyages. Je rêvais d’aventures, d’amours et d’ailleurs. Mais aussi de dangers et de galères. De tout ce qui pouvait éloigner ma vie des sables mouvants. J’en avais construis des scénarios, mais ce club de billard dissimulant une salle de poker clandestin, jamais je n’aurais pu imaginer y débarquer un jour… Et pourtant voila que j’y suis, et que la partie commence.

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Tiago ne s’est pas installé avec nous. Quelques minutes plus tôt, après avoir essuyé un premier refus auprès de Dana, il m’a demandé de lui prêter l’argent pour participer à la partie. Notre futur professionnel n’a malheureusement pas les moyens de débourser les quelques centaines de soles pour tenter sa chance avec nous. Son image en prend un coup, mais pas autant que sa carrière qui risque d’être compromise… Il s’assoit sur le côté et commande sa seconde bière.

En dehors du croupier, les six autres sont là pour en découdre. J’en repère rapidement deux qui semblent sortir du lot. La trentaine, l’attitude calme et réservée des bons joueurs, la concentration durant la partie, pas d’alcool, et surtout, l’attention fixée sur l’adversaire à chaque fois qu’ils jouent une main. L’un des deux, tshirt noir me regarde si intensément lors d’une de nos premières confrontations que je détourne les yeux, déstabilisé.

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Je n’avais pas observé une telle attitude depuis la rencontre de quelques bons réguliers de Lima, et suis impressionné de la trouver à cet endroit, dans une partie supposée relativement faible. Par chance, les deux sont assez éloignés de ma position et je n’aurai pas à craindre de les avoir tout le temps dans mes pattes à chaque main jouée.

Les quatre autres semblent à ma portée. Juste à ma gauche, un grand maigre, la quarantaine semblant être venu pour s’amuser. A peine installé il entame son premier litre de bière, joue 80% des coups en rigolant avec ses amis. A sa gauche, l’organisateur. Il n’a pas l’air mauvais, mais son attitude générale et ses premières mains me laissent penser qu’il ne sera pas particulièrement surprenant ou agressif. Un joueur « ABC ». A gauche des deux bons joueurs, un trentenaire typé chef d’entreprise. Son attitude froide pourrait à première vue le faire passer pour un bon joueur, mais le fait qu’il a cavé le strict minimum me fait penser le contraire. Enfin, juste à ma droite, un dernier péruvien rigolard, bière sur la table et bide bien en place complète le tour de table.

C’est lui qui m’adresse la parole en premier et veut en savoir plus sur moi. Nous parlons quelques minutes et en arrivons à mon voyage. Etonnamment, mon histoire qui déclenche généralement sympathie et bonne humeur semble les laisser relativement insensibles. Tshirt noir m’écoute parler en me regardant dans les yeux, mais ne décroche pas un sourire.

–          Et tu fais quoi ici ?

–          Je suis à Piura pour quelques jours, ensuite je pars en Equateur

–          Et comment tu finances tout ça ?

Trois mois plus tard, je ne sais toujours pas pourquoi j’ai eu ce geste hésitant vers les jetons.

–          En jouant au poker ? Tu es professionnel ?

–          Non… Enfin pas vraiment… Enfin juste pour ce voyage, avant j’étais architecte.

Quel con. La conversation s’arrête là, le mec a l’air pensif. Il y a des endroits où je raconte avec plaisir l’histoire du World Poker Trip. Ca anime la table, enclenche la conversation. Ce genre de club clandestin, où les joueurs n’ont pas l’habitude de recevoir des étrangers n’en fait clairement pas partie. J’ai tout de suite compris que j’avais fait une erreur, mais il était trop tard. Je me suis contenté de jouer, et ça tombait plutôt bien car j’ai tout de suite eu un rush énorme. Première main, double paire, j’envoie mon continuation bet, tout le monde se couche. Deuxième main, les as, je surrelance préflop, tout le monde se couche. Troisième main, je paie avec 34 assortis, flop 256. Je relance rigolard, le miseur initial, probablement déjà agacé, il s’envoie en l’air avec sa paire de 99, nous jouons depuis dix minutes et j’ai déjà doublé.

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J’opte pour une stratégie adaptée à la nature de la table. Je joue serré contre les deux requins, et essaie de rentrer dans un maximum de coups contre les autres, qui de toute manière rentrent à presque chaque main. Lorsque je touche quelque chose, j’essaie de le valoriser, ce qui n’est pas très compliqué car, à l’instar de Tiago qui enchaine désormais bière sur bière, les autres sont bientôt beaucoup moins lucides. Contre ceux qui restent sobres, je me construis petit à petit une image de joueur sérieux, qui me permet de prendre quelques spots.

( La partie technique vous avait manquée ? Eh bien la voici de retour !)

L’un d’eux arrive vers une heure du matin. Au bouton, je reçois AJ de pique et relance deux limpers, tshirt noir et chef d’entreprise, à 6 blindes. Tout le monde se couche, jusqu’à chef qui décide de payer. Le flop arrive :

T de cœur, 6 de cœur, 2 de trefle (pot 15 blindes)

Chef check. Ce flop est l’un des meilleurs que je puisse espérer, en dehors de ceux que je touche directement. Mon adversaire aura rarement une main puissante ici, et même s’il paie, je vais souvent pouvoir lui mettre la pression sur les futures cartes.

« C’est qui ça ? »

Je décide de faire mon continuation bet en bluff à 10. Il ne réfléchit pas longtemps avant de payer. Les possibilités sont nombreuses. Il a probablement n’importe quelle paire du board, ou paire servie jusqu’à 99. Il a quelques fois un tirage couleur, d’autre fois un tirage quinte avec des mains du genre 78/79, parfois juste un as qui paie une fois pour voir ce que je vais faire ensuite. Il est encore un peu tôt pour réduire sa range (son éventail de mains)

« C’est le même que la dernière fois ? »

Turn : K de pique (pot 35 blindes)

La carte parfaite. A Part un as ou un valet, je ne pouvais pas espérer mieux. La première bonne nouvelle, c’est que ce roi de pique m’offre un tirage quinte invisible, qui si je le touche, me donnera la combinaison maximale. De plus, le roi, comme carte supérieure à celle du flop peut effrayer mon adversaire et me permettre de bluffer une grande partie des mains avec lesquelles il m’a payées au flop. En terme technique, je viens de gagner en equité et en fold equité.

– Oui, c’est le même ! Il fait quoi ?

– Je sais pas, on dirait qu’il est sur les motos 

Si je mise fort ici, que peut-il faire s’il a 77 ou 56 ou A2 ? La plupart du temps, il n’aura pas d’autres choix que de se coucher. Je peux très bien avoir ce roi, et même si je ne l’ai pas, plane la menace d’une troisième salve… L’autre bonne nouvelle, c’est que la plupart des mains avec lesquelles il va décider de continuer sont très souvent derrière moi : les tirages coeur et quinte, que je bats souvent avec hauteur AJ. C’est une situation ultra classique au poker, celle de la scare card (carte effrayante). Contre un bon joueur, ce serait presque une erreur de miser ici, car l’action est tellement évidente qu’elle pourrait se retourner contre moi, mais dans ce cas précis, mon adversaire est mauvais, il faut bluffer.

Avant de miser, je commence à préparer mes jetons, et lève la tête pour observer sa réaction.

Il est debout. Toute la table est debout. Et ils ne s’intéressent pas du tout à moi. Tous regardent dans la même direction : les caméras. Je me retourne pour voir l’écran.

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« -On fait quoi, on y va ?

-Je sais pas »

Il me faut quelques secondes pour voir sur l’écran de gauche cette ombre qui s’est approchée furtivement des motos. Elle regarde autour d’elle, et ne voyant personne, commence à s’activer autour du guidon de l’une des bécanes. A l’intérieur, plus aucun bruit. Je me suis moi aussi levé, et regarde les joueurs s’approcher doucement de l’entrée, gérant en tête.

La suite se passe en un instant. Dans le silence de la rue on entend soudain le vacarme du rideau métallique qui se relève d’un coup. Le mec sursaute si fort que je le vois sur l’écran. Il regarde vers nous. Les huit sortent en hurlant. L’ombre disparait en un instant. Des bruits de course, des insultes. Et  une détonation.

J’ai d’abord cru à un pétard, mais qui viendrait faire exploser un pétard dans une rue déserte à deux heures du matin ? En même temps, jamais de ma vie je n’avais entendu en vrai le bruit d’un tir. Je suis resté quelques secondes de plus à l’intérieur, et quand j’ai vu dans les caméras les mecs revenir, je suis sorti aussi. Ils inspectaient la moto.

« Il a pris quelque chose ?

Oui regarde, le rétro, il l’a laissé tomber là bas »

Il manque gérant et tshirt noir, qui reviennent transpirants après un petit moment. Dans la main du premier, un revolver noir, au long canon fin. Presque le même que celui avec lequel j’avais été agressé à Santa Cruz.

« vous l’avez eu ?

-Non, il s’est enfui, ce huevon (con) courait vite

– Putain, il m’a tué, c’est plus de mon âge ces conneries » rajoute gérant à bout de souffle.

Tout le monde se marre. Ils replacent le rétro sur la moto, et rentrent dans le local en plaisantant. Au bout de quelques secondes, tout le monde est installé, la partie reprend. Au total, il n’y a pas eu plus de cinq minutes d’interruption.

« On en était où ? »

Il est décidé d’annuler la main en cours. Nous reprenons nos jetons, et le croupier distribue. La partie reprend comme si de rien n’était, et la discussion tourne rapidement autour de ce qui vient de se passer, puis de l’arme de tshirt noir, où il l’a achetée, si elle lui plait. Il la sort de son jeans et la pose sur la table tout en discutant, raconte comment il l’a utilisée quelques semaines plus tôt lorsqu’un voleur a voulu dévaliser son magasin. Cette fois-ci, il ne l’a pas raté, le mec a été refroidi. J’imagine qu’à cet instant je dois faire une drôle de tête car il me regarde et pour la première fois me lâche avec un grand sourire :

« Ben tu vas en avoir des histoires à raconter maintenant ! »

Il ne croit pas si bien dire… Tout le monde se marre, moi aussi, nerveusement probablement. C’est une discussion entre potes, il n’y a aucune tension dans l’air mais je ne sais plus trop ce que je fous ici. Il est temps de mettre les voiles. De toute manière, les gros perdants sont déjà en train de s’en aller. J’ai moi-même engrangé un bénéfice de deux caves qui, vu le déroulement de la soirée, me convient parfaitement, et me permet de terminer tranquillement mes derniers jours au Pérou sans souci d’argent. Je reste environ une heure de plus, histoire de rester poli, puis demande à Tiago s’il veut partir. Le bougre qui est resté toute la soirée sur le côté à picoler est désormais complètement bourré et ne répond plus de rien. Peu importe, je rentre en taxi.

Je suis presque surpris de récupérer mon dû sans mauvaise surprise. Je salue tout le monde et lâche un hasta luego peu convaincu avant de demander au chauffeur de m’emmener chez Aida.

Il est trois heures du matin lorsque je pousse la porte laissée entrouverte de son studio. Il fait complètement noir et je mets quelques secondes pour distinguer l’unique lit de la pièce où dorment les deux meilleures amies. On n’entend pas un bruit, si ce n’est celui des respirations. Elles m’ont laissé une place au milieu, dans laquelle je me faufile, de côté, face à Eva. Et au moment d’arriver à sa hauteur, je constate que ses yeux sont grand ouverts. Elle ne dort pas.

Elle m’attend.

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14 Comments

  1. says:

    la question est. Est ce que sa copine dort aussi…:)

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  2. says:

    la suite au prochain episode ! jajajaa

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  3. says:

    esoooooooo! tu as répondu a ma QS. Amérique du S et jeune français ca colle pas mal jejeje!Tu es une friandise ! enjoyyy

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  4. says:

    T’es un ouf mec…Nice trip…

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  5. says:

    sacré veinard !

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  6. says:

    J’adore…. Et depuis le début lol. Tension, atmosphères, personnages et même de la technique pok 😉 Hâte de lire la suite (bonne écriture en plus) Enjoy on vit ça avec toi…

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  7. says:

    geni1l bravo

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  8. says:

    Vraiment enorme ! Continue !

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  9. says:

    Ohhhh increíble final! Imagino la sorpresa en tu rostro que de seguro te causó esa mirada! La continuación urge!

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  10. says:

    Super article, et très belle plume!!

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  11. C’est marrant, je suis tombé sur ton blog parce que tu as téléchargé notre plugin wordpress et je ne sais pas trop pourquoi j’ai choisi cet article pour commencé ma lecture, mais tu m’as complètement captivé! Je me demande encore comment je n’ai pas pu tomber sur ton blog avant! Je m’attaque de ce pas à tes 12 meilleurs articles 😉

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